• Affaire DSK: l'accusation avance un rapport médical

    New York (Etats-Unis), Correspondant - "Agression, viol" : ces mots concluent le rapport médico-légal des médecins qui ont examiné Nafissatou Diallo après la tentative de viol et la relation sexuelle forcée que cette femme de chambre affirme avoir subies de la part de Dominique Strauss-Kahn (DSK), lors de son séjour à l'hôtel Sofitel de New York, le 14 mai.

    Après que sa cliente eut multiplié les apparitions publiques dans les jours qui ont précédé l'audience finalement reportée du 1er août, son avocat, Kenneth Thompson, a poursuivi, mardi 16 août, sa campagne de communication, à une semaine de l'audience qui devrait sceller le destin judiciaire de l'ex-directeur général du Fonds monétaire international.

    Le 23 août, le procureur du district du comté de New York, Cyrus Vance, devrait annoncer au juge sa décision : poursuivre DSK devant un tribunal pénal ou interrompre l'enquête sine die, selon la procédure dite "nol pros", qui ne constitue pas un non-lieu mais s'y résume souvent de facto.

    CONFIRMATION DE PRÉCÉDENTES DÉCLARATIONS

    Cette fois, Me Thompson a livré à l'hebdomadaire français L'Express l'essentiel du rapport fourni à la police par une équipe de l'hôpital St. Luke's-Roosevelt de New York, qui a examiné Mme Diallo après son arrivée en ambulance. Intitulé "Notes d'examen médico-légal d'agression sexuelle", il résume les premières déclarations de Mme Diallo et le constat des médecins.

    "L'homme nu aux cheveux blancs" déchire ses collants, y lit-on, il "saisit la partie extérieure de sa zone vaginale (…). Il enfonce profondément son pénis dans sa bouche en la saisissant par les cheveux", etc.

    Dans un entretien accordé à l'hebdomadaire, son avocat fournit un luxe de détails sur les diverses façons dont DSK aurait, selon lui, agressé sa cliente. Il répond en particulier par anticipation à ceux qui seraient tentés de soutenir qu'il est impossible de contraindre une femme à pratiquer une fellation.

    Les éléments médico-légaux apparaissent pesants pour DSK. "Confusion, douleurs musculaires, tension", écrit le premier médecin qui a vu Mme Diallo, qu'il décrit "en larmes". Celle-ci "souffre de l'épaule gauche mais, selon elle, bien moins qu'en début d'après-midi". Me Thompson explique à L'Express qu'une chute forcée de sa cliente aurait provoqué la rupture de ligament ultérieurement constatée au scanner.

    Un schéma de la zone vaginale apparaît en dernière page, une zone hachurée au crayon, à côté de laquelle le médecin écrit "rougeur sur la fourchette", indiquant l'emplacement d'un traumatisme (la "fourchette postérieure du vagin"). Les termes de conclusion sont les suivants : "Diagnostic: agression. Cause des blessures : agression. Viol."

    Ce rapport confirme les déclarations que le docteur Susan Xenarios avait faites au Monde (daté 7 juillet). Première à avoir examiné Mme Diallo, elle y décrivait une femme "arrivée en état de choc, très secouée, très affectée". Elle disait aussi n'avoir "pas mis en doute son témoignage. Et notre équipe est constituée de personnes formées et très expérimentées pour écouter les personnes ayant été violentées."

    FAIRE PRESSION SUR LE PROCUREUR ?

    Dans un communiqué, William Taylor et Benjamin Brafman, les défenseurs de M. Strauss-Kahn, ont dénoncé "une tentative trompeuse et malhonnête" des avocats de Mme Diallo. "Ces rapports hospitaliers sont fondés presque exclusivement sur la parole de la plaignante, dont il a été démontré à de multiples reprises qu'elle n'est pas crédible. De plus, ils confirment qu'[elle] n'a présenté aucune blessure provoquée par une relation contrainte", écrivent-ils.

    Selon eux, les descriptifs de l'état de la plaignante "peuvent être rapportés à bien d'autres causes possibles qu'une agression sexuelle, y compris à une activité sexuelle intervenue plusieurs jours avant l'épisode en question".

    En divulguant ces éléments du rapport, Me Thompson entend-il faire pression sur le procureur Cyrus Vance pour qu'il se décide à poursuivre M. Strauss-Kahn devant un tribunal pénal ? "Aucunement!", rétorque-t-il, dans un entretien accordé au Monde. "On ne peut forcer un procureur à aller au procès. Il dispose des mêmes éléments que nous. A lui de décider."

    Pourquoi dès lors avoir porté plainte au civil pour obtenir un dédommagement, avant même de savoir si un procès pénal aura lieu ou pas, ce qui est rare aux Etats-Unis et risque de renforcer l'idée que la plaignante agit par cupidité ? "Contrairement à l'idée reçue, les cas de plainte pour réparations au civil concomitamment à une action au pénal sont nombreux, rétorque l'avocat. Nous souhaitons très vivement que M. Vance s'engage dans un procès pénal. Vu les éléments à charge, ne pas le faire serait scandaleux, une grande injustice. S'il s'y refuse, nous attaquerons de toute façon au civil."

    Hormis le rapport médico-légal et le témoignage de sa cliente, Me Thompson dispose-t-il d'autres éléments à charge contre DSK ? "Evidemment. Cinq personnes ont vu Nafissatou Diallo dans les instants ayant suivi son agression. Toutes témoignent d'une femme émotionnellement détruite, d'où leur appel à la police. Lors de la première comparution de l'accusé, le procureur adjoint Artie McConnell, a évoqué des “preuves convaincantes”. Elles ont été présentées au grand jury et c'est sur leur base que celui-ci a inculpé M. Strauss-Kahn de tentative de viol et d'actes sexuels criminels au premier degré. Depuis, rien n'a changé. Actés devant un juge, ces faits restent valides."

    La position du procureur apparaît aujourd'hui difficile. Si, le 23, il demande au juge un nouveau délai pour fixer sa position, ce dernier devrait non seulement probablement le lui refuser, mais aussi décider qu'en l'absence de dépôt d'un acte d'accusation menant au procès, il proclame la clôture du dossier en l'état.

    Cela n'empêcherait pas M. Vance de le rouvrir s'il détenait de nouveaux éléments ; mais DSK, libre, se verrait remettre son passeport et aurait tout loisir de quitter le territoire américain, rendant très improbable que ce dossier soit jamais rouvert. Procès ou arrêt des poursuites : le procureur devra donc vraisemblablement se déterminer d'ici à mardi.

    LeMonde


    Tags Tags :
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :